Le prix du bois explose : artisans en danger, particuliers en colère
Avec des augmentations grimpant jusqu’à 80 % depuis septembre 2020, les tarifs du bois, historiquement très stables, viennent de s’envoler dans des proportions qui mettent en difficulté les artisans et provoquent le courroux des particuliers. En toile de fond, une menace se précise : celle d’une pénurie.
« Des clients déboulent dans le magasin et provoquent des esclandres. Ils disent que c’est un scandale, que c’est honteux. C’est très compliqué. Les gens sont nerveux, à fleur de peau ». Michaël Dubail, codirecteur du magasin « Bois et dérivés », l’un des principaux acteurs du marché du bois dans l’Aire urbaine, ne le cache même pas : ses journées, déjà bien chargées en temps normal, sont devenues aussi stressantes qu’interminables.
Un quotidien bousculé par un tsunami balayant toutes les certitudes d’un secteur, celui du bois, ressemblant d’habitude à une mer calme et sereine. « C’est bien simple : depuis 30 ans, les prix n’ont pas bougé », reprend le gérant de cette enseigne qui emploie 45 collaborateurs, pour un chiffre d’affaires de 12 millions d’euros. « Et là, en quelques mois, ils se sont envolés ».
Des prix presque doublés sur certains produits
Deux chiffres suffisent à mesurer l’ampleur du phénomène : depuis septembre 2020, le prix des panneaux OSB (NDLR : plusieurs couches de lamelles de bois compressées puis encollées) a grimpé de 60 %, tandis que celui du bois massif abouté (mis bout à bout pour constituer des planches de 13 m) a flambé de 80 % !
En cause, de multiples facteurs : les scolytes (ces parasites faisant mourir les arbres sur pied), les sécheresses, la pandémie de Covid-19 qui a mis la production à l’arrêt, mais aussi le contexte géopolitique mondial. Les ouragans et incendies de 2020 ont ainsi provoqué une énorme demande aux USA, pays qui, sous Donald Trump, a surtaxé les importations de bois canadien… et vient désormais rafler une plus grosse partie des stocks européens. Mécaniquement, les tarifs montent.
Ajoutez à cela l’envolée actuelle de l’immobilier, mais aussi l’engouement de plus en plus fort des clients pour le bois, produit noble, résistant, chaleureux, et vous comprendrez pourquoi la situation est en train de devenir hors de contrôle. L’entreprise « Bois et dérivés », sentant ces hausses arriver, a ainsi envoyé un courrier le 5 octobre dernier à ses clients professionnels, afin de leur expliquer la situation… tout en leur suggérant de faire attention au moment d’établir leurs devis, en répercutant ces envolées tarifaires annoncées.
Des artisans au bord du vide
« Tout le monde ne l’a pas pris en compte », reprend Michaël Dubail, « et avec la flambée des prix entre-temps, des artisans se retrouvent coincés ». Pour éviter les faillites en rafale, une seule solution d’après ce passionné de la filière bois : que les particuliers ayant déjà signé des devis acceptent d’entamer des discussions en bonne intelligence avec leurs artisans.
« Comment voulez-vous, en effet, que ceux-ci engagent des chantiers en sachant qu’ils vont perdre de l’argent dès les premières heures ? Ce qui peut se passer : soit l’artisan réalise un travail qui n’est pas à la hauteur de son exécution habituelle, soit il met la clé sous la porte au milieu du chantier. Honnêtement, je crains de grosses défaillances dans les prochains mois ». Un deuxième semestre 2021 qui pourrait, qui plus est, être marqué par un terme redouté de tous, plus encore que l’augmentation des prix : la pénurie de bois, qui semble plus que jamais inévitable.
Source : estrepublicain.fr