La numérisation 3D
Définition de la numérisation 3D
La numérisation 3D représente l’activité visant à virtualiser une espace réel sous la forme de données numériques tridimensionnelles à des fins d’exploitation informatique.
Elle porte dans les pays anglophones le nom de “Reality Capture” que nous pouvons traduire par “Capture de la Réalité”.
La numérisation 3D repose essentiellement sur deux technologies complémentaires :
- Le LiDAR, qui mesure en temps réel la distance d’un point par l’envoi d’un faisceau laser,
- La photogrammétrie, produisant une reconstruction 3D reposant sur un post-traitement basé sur l’image, à la manière de la vision stéréoscopique du cerveau humain.
Les applications s'étendent de l’industrie au cinéma en passant, entre autres, par la médecine, la construction et l’archéologie. Les données 3D collectées démontrent leur intérêt en rétro -ingénierie, reconstruction à des fins de préservation ou de duplication de sites ou d’objets, virtualisation à des fins de simulations techniques ou expériences immersives. La numérisation des espaces allant de pair avec la digitalisation connue par l’ensemble des secteurs au cours du 21è siècle.
La numérisation 3D appliquée à la construction
La numérisation 3D appliquée à la construction consiste en la captation tridimensionnelle automatisée, et sans contact physique de sites existants ou d’ouvrages déjà construits. Contrairement aux méthodes traditionnelles de relevé nécessitant le déplacement d’une personne, habituellement un géomètre, muni d’un appareil mesurant la localisation d’un point proche de sa propre position; la numérisation 3D permet de mesurer des espaces distants et potentiellement inaccessibles à un humain.
Les matériels de numérisation tridimensionnelle habituellement employés dans le BTP sont les scanners laser 3D (lasergrammétrie reposant sur la technologie LiDAR), les drones et appareils photo numériques (photogrammétrie aérienne ou terrestre).
Le nombre de points mesurés au terme de la captation est sans comparaison possible avec un relevé traditionnel, les jeux de données dépassant habituellement le million, voire le milliard de points. Le temps de captation est également fortement réduit, et la précision encore accrue.
Grâce à ces avantages certains, la capture de réalité appliquée au BTP bouleverse les métiers et donne naissance à de nouvelles applications, en termes d’ingénierie numérique de la construction.
Bien que l’application de la numérisation 3D à la construction soit un phénomène récent, les technologies employées existent, pour certaines, depuis plus de cinquante ans.
Histoire de la numérisation 3D
La numérisation laser 3D apporte une réponse au besoin de comprendre les objets. De nombreuses innovations sont venues combler ce besoin au cours des décennies. La science et la technologie ont été à la fois les domaines ayant permis l'émergence des technologies de numérisation 3D, mais également les utilisateurs presque exclusifs de ces mêmes outils pendant de longues années. C’est finalement le phénomène global de digitalisation des métiers qui a conduit à sortir la numérisation 3D des laboratoires.
L’idée a germé au cours des années 1950. En 1953, l’armée des États-Unis a mis à l’essai un appareil de mesure optique associant lumière et obturateurs à grande vitesse. Ils ont appelé le projet “LiDAR”, qui signifie “LIght Detection And Ranging” et peut se traduire par “détection et estimation de la distance par la lumière”. Paradoxalement, les lasers n’étaient même pas encore inventés lors de ce projet !
Détection de tranchées par LiDAR lors de la Première Guerre Mondiale
Ce ne sera qu’au cours des années 1960 que le laser prendra la place centrale de cette technologie. Parallèlement, l’entreprise Écossaise Ferranti lançait une machine de mesures précise munie d’un palpeur, un bras horizontal, appelée “machine à mesurer tridimensionnelle” (MMT). Bien qu’étant un appareil de mesure par contact, il n’en demeure pas moins que l’objectif était de mesurer une géométrie en trois dimensions. Une entreprise Italienne proposera dans les années 60 un modèle plus puissant de MMT sur portique.
Malgré sa déclassification rapide pour en permettre le développement, la technologie LiDAR ne sut séduire les industriels, lesquels se tournèrent en masse vers la numérisation 3D par contact au cours des années 70. L’informatisation des MMT permit d’augmenter la vitesse de mesure et stimula, par la même occasion, l’intérêt d’un nombre croissant de professionnels.
Partout où le regard humain reste actuellement nécessaire pour interpréter des données de numérisation 3D, l’intelligence artificielle continuera de gagner du terrain.
Robotisation des outils de numérisation
Les technologies de mobile-mapping ont été créées pour autonomiser les véhicules et robots en leur procurant les yeux qu’ils n’ont pas pour se situer dans l’espace et, par la même occasion, pour le cartographier. Les données ainsi collectées ne sauraient rester dans la mémoire temporaire des appareils autonomes bien longtemps.
Les géomètres font commerce de la cartographie des espaces. Comment imaginer que les données collectées par les robots et véhicules autonomes, plus rapidement, en plus grande quantité et à plus grande fréquence, ne trouvent pas de clients ?
La valeur marchande des données collectées par ces flottes de “géomètres mécaniques” conduira, inévitablement, à la création d’un commerce massif de données 3D. Les géants du digital tels que Google, Facebook et Amazon, dont le commerce repose précisément sur la collecte de données, trouveront un nouvel eldorado avec ce marché.
Les applications concrètes pour la construction peuvent se résumer très simplement : il s’agit de supprimer l’humain qui est aujourd’hui derrière son scanner laser 3D, aux commandes de son drone ou agrémenté de son scan à dos de cartographie (mobile-mapping sur “backpack”, nous en parlerons dans un prochain chapitre).
Au-delà des questions d’éthique que cela suppose, supprimer l’humain de l’activité de numérisation présente de nombreux avantages : accès à des sites dangereux (numérisation d’un espace radioactif ou pollué, d’anciennes mines), complexes (numérisation d’égouts ou de galeries) ou éloignés (activation à distance d’un robot de numérisation situé de l’autre côté de la planète).
Virtualisation des espaces et tourisme numérique
Numériser un espace revient à le rendre disponible pour n’importe quelle exploitation informatique. Parmi elles, la réalité virtuelle, la réalité augmentée et la réalité mixte. Au delà des termes qui renvoient vers des nuances importantes au niveau de l’interface homme-machine, ce sont les applications à la clé qui amènent de nouvelles opportunités au marché du mobile-mapping. Nul doute que le tourisme virtuel fera partie des pratiques courantes dans quelques décennies.
Visiter les temples Maya et la muraille de Chine en une seule soirée gratuitement, depuis votre salon n’est-il pas une perspective intéressante ?
Quand bien même auriez-vous les moyens d’acheter les billets d’avion ad hoc, serait-il pertinent de dépenser votre argent et votre temps ? La planète peut-elle encore supporter le tourisme de masse et l’effroyable bilan carbone qui lui est associé ?
Ces propos peuvent sembler utopiques ou délirants. Sachez tout de même que vous avez déjà fait usage de ce type d’application, car les villes en 3D que vous regardez dans Google Earth et Google Maps ont été modélisées par photogrammétrie, une des techniques de numérisation 3D présentées dans ce livre. Il est certes probable que vous n’ayez pas fait cette expérience à l’aide d’un casque de réalité virtuelle, mais le marché de la numérisation 3D en sera-t-il transformé ? Qu’elle soit diffusée dans un casque, un smartphone ou un ordinateur, la donnée 3D capturée reste la même !
Ces visites de lieux numérisés trouvent des applications concrètes dans la construction. De la visite virtuelle immobilière (applications dites “Real-Estate”) à la communication publique pour les gestionnaires de territoires (virtualisation des espaces et des villes en “Smart City” et “SIG 3D”, “Systèmes d’Information Géographique”), le monde de l’architecture et du BTP saura sans conteste s’approprier les usages de la virtualisation des espaces, dont le prérequis est leur numérisation.
Ces quelques lignes prospectives ne sauraient avoir la prétention de prédire l’avenir, et encore moins de le faire de manière objective. Les prochaines années démontreront, ou non, la pertinence des axes de développement évoqués au cours de cet exercice. L’objectif n’est pas de jouer aux prophètes, mais d’orienter votre regard vers de nouvelles applications concrètes utiles pour vos projets.
La croissance prévisionnelle du marché de la numérisation 3D est estimée à 1400% pour les dix prochaines années.
Ces propos, volontairement prospectifs, axés sur l’innovation se veulent inspirants et stimulants. Car, sans enthousiasme, il n’y a pas d'apprentissage de qualité. Et sans inspiration, aucune innovation n’est possible. Une grande part des métiers dits historiques est vouée à disparaître.
Source : numerisation3d.construction/ le-marche-de-la-nulerisation-3D